Et elle est repartie... Ce matin, une fois de plus, Geneviève Bois a quitté sa ferme de La Gevraisière, à Sainte-Opportune, pas loin de Flers, dans l'Orne, pour se rendre, par les petites routes sinueuses et charmantes du bocage normand, chez son amie Sylvie Ouvry qui habite à Berjou, précisément à La Gilberdière : c'est juste à la frontière de Sainte-Honorine-la-Chardonne si vous voyez...
Là, pour nous, à la grande table, Sylvie a ouvert « L'Agriculteur en Herbe », le plateau aux quatre saisons, les pions, les bons et les buchettes, les 500 cartes/questions... Très malin ce « trivial pursuit » paysan. Il n'y avait qu'elles, militantes et grandes expertes,
Là, pour nous, à la grande table, Sylvie a ouvert « L'Agriculteur en Herbe », le plateau aux quatre saisons, les pions, les bons et les buchettes, les 500 cartes/questions... Très malin ce « trivial pursuit » paysan. Il n'y avait qu'elles, militantes et grandes expertes,
« On s'est dit "Comment on communique avec les non-agricoles ?"»
Il y a de ça six ou sept ans, Sylvie et Geneviève, qui gèrent un troupeau de 45 vaches laitières avec leurs maris Didier et Jean-Marie, se remettent une fois de plus en question lors d'une réunion du Civam, ce réseau de paysans qui s'entraident et militent pour une agriculture durable. « Un jour, on s'est dit "On est dans la parlote, la question est : comment on communique avec les non-agricoles ?" »
Pour se faire comprendre de toutes les catégories sociales et de toutes les générations, il faut trouver quelque chose d' « éducatif et ludique », et aussi qui ne vieillisse pas. Un jeu, c'est la bonne solution. Mais une fois qu'on a ensemencé, comme d'habitude, tout reste à faire. Elles se lancent avec quelques collègues. Sans aucun budget. Une seule aide mais précieuse, celle d'Erika Van Lierde, animatrice à la Fédération bas-normande des Civam. Le reste, les kilomètres, le temps, le remue-méninges, c'est pour elles.
Pour se faire comprendre de toutes les catégories sociales et de toutes les générations, il faut trouver quelque chose d' « éducatif et ludique », et aussi qui ne vieillisse pas. Un jeu, c'est la bonne solution. Mais une fois qu'on a ensemencé, comme d'habitude, tout reste à faire. Elles se lancent avec quelques collègues. Sans aucun budget. Une seule aide mais précieuse, celle d'Erika Van Lierde, animatrice à la Fédération bas-normande des Civam. Le reste, les kilomètres, le temps, le remue-méninges, c'est pour elles.
Partout, carnet et crayon en poche
D'abord concevoir. Les idées cheminent. Le joueur devra suivre, bien sûr, la marche infinie des quatre saisons : « pour acheter local, il faut les connaître... » Il partagera le travail du paysan en tombant sur les cases « saison » et « surprise » ; il s'initiera à sa science ancestrale avec les questions « Découverte de l'agriculture », il trempera dans les lourds débats d'aujourd'hui avec les questions « Agriculture durable » déclinées équitablement dans les trois thèmes : économique, social, environnement.
Mais 500 questions (et réponses), il faut les trouver ! « Partout où on allait, on avait un carnet et un crayon dans la poche ». Et cela a bien duré un an. En fait, elles auront impliqué des tas de gens. Avant de boucler le jeu, elles mettent « un prototype en test durant six mois auprès d'agriculteurs, de clubs d'anciens, d'enseignants... »
Tout en cherchant un graphiste, au final un étudiant nantais, elles chassent aussi les financements auprès des collectivités et des mécènes. Puis vient le moment de fabriquer. Pour dénicher l'entreprise qui fasse l'affaire, Geneviève et Sylvie labourent Internet et le milieu associatif ; glanent des adresses et références dès qu'un jeu leur passe entre les mains ; prennent par la suite contact par mail, lettre, téléphone, et la discussion, alors, n'est pas forcément simple.
« Les pions, ça a été toute une histoire. On voulait des petits personnages ; pour 2 000 jeux il en fallait 12 000 : trop pour un artisan, trop peu pour une entreprise. » Finalement, c'est dans le fief du jouet, le Jura, qu'elles auront fini par trouver leurs pions. Lesquels sont par ailleurs, bien sûr, d'un bois et d'une peinture écologiquement garantis.
Mais 500 questions (et réponses), il faut les trouver ! « Partout où on allait, on avait un carnet et un crayon dans la poche ». Et cela a bien duré un an. En fait, elles auront impliqué des tas de gens. Avant de boucler le jeu, elles mettent « un prototype en test durant six mois auprès d'agriculteurs, de clubs d'anciens, d'enseignants... »
Tout en cherchant un graphiste, au final un étudiant nantais, elles chassent aussi les financements auprès des collectivités et des mécènes. Puis vient le moment de fabriquer. Pour dénicher l'entreprise qui fasse l'affaire, Geneviève et Sylvie labourent Internet et le milieu associatif ; glanent des adresses et références dès qu'un jeu leur passe entre les mains ; prennent par la suite contact par mail, lettre, téléphone, et la discussion, alors, n'est pas forcément simple.
« Les pions, ça a été toute une histoire. On voulait des petits personnages ; pour 2 000 jeux il en fallait 12 000 : trop pour un artisan, trop peu pour une entreprise. » Finalement, c'est dans le fief du jouet, le Jura, qu'elles auront fini par trouver leurs pions. Lesquels sont par ailleurs, bien sûr, d'un bois et d'une peinture écologiquement garantis.
Salons et marchés
Troisième et dernière grande étape : diffuser, vendre. Voilà les deux agricultrices courant les salons, dont deux à Paris. Elles font les marchés de Noël ; se partagent le travail sur un stand unique : l'une au jeu, l'autre aux produits ; elles répondent aux journalistes... Toujours, heureusement, la Fédération des Civam donne le coup de main.
Aujourd'hui, de ce jeu, elles semblent les premières gagnantes. « Nous avons beaucoup appris. » Sûrement mais c'est trop de modestie. Cette entreprise de folie n'est pas arrivée par hasard : elle s'inscrit dans une dynamique professionnelle et militante, dans une « action politique ». Elles qui ne s'étaient pas destinées à devenir agricultrices - à l'origine, Geneviève est technicienne de gestion et Sylvie une littéraire -, qui ont choisi la profession agricole pour le mode et la qualité de vie, n'ont jamais cessé de batailler pour faire évoluer leur milieu.
Aujourd'hui, de ce jeu, elles semblent les premières gagnantes. « Nous avons beaucoup appris. » Sûrement mais c'est trop de modestie. Cette entreprise de folie n'est pas arrivée par hasard : elle s'inscrit dans une dynamique professionnelle et militante, dans une « action politique ». Elles qui ne s'étaient pas destinées à devenir agricultrices - à l'origine, Geneviève est technicienne de gestion et Sylvie une littéraire -, qui ont choisi la profession agricole pour le mode et la qualité de vie, n'ont jamais cessé de batailler pour faire évoluer leur milieu.
Le jeu de l'agriculture durable : être bon partout
Et il évolue. Dans le réseau, le bio, par exemple, progresse ainsi que la démarche de l'agriculture durable, ce qui n'est pas forcément la même chose : « Il y a aussi du bio intensif ! ». Hors du réseau des Civam, le jeu, considéré au départ « comme une provoc », a marqué des points : la Chambre d'Agriculture de l'Orne elle-même l'a adopté. « Si l'agriculture évolue, c'est aussi parce que des gens réfléchissent, se remettent en question, posent des gardes-fous ; les choses ont souvent changé grâce à des minorités », ajoutent-elles.
« L'agriculture durable n'est pas de la seule responsabilité des agriculteurs », disent-elles aussi. Alors, pour en savoir plus, jouons ! Et sans tricher. Ça ne sert à rien. Pour gagner, il faut être bon partout : à la fois sur les questions économiques, sociales et environnementales. Comme un paysan de demain.
Michel Rouger
Pour acheter le jeu « L'Agriculteur en herbe » (30 €) :
S'adresser à la Fédération régionale des Civam de Basse-Normandie
2 place du 8 mai 1945, 14500 Vire.
Tél. 02 31 68 80 58
frcivambn@yahoo.fr
« L'agriculture durable n'est pas de la seule responsabilité des agriculteurs », disent-elles aussi. Alors, pour en savoir plus, jouons ! Et sans tricher. Ça ne sert à rien. Pour gagner, il faut être bon partout : à la fois sur les questions économiques, sociales et environnementales. Comme un paysan de demain.
Michel Rouger
Pour acheter le jeu « L'Agriculteur en herbe » (30 €) :
S'adresser à la Fédération régionale des Civam de Basse-Normandie
2 place du 8 mai 1945, 14500 Vire.
Tél. 02 31 68 80 58
frcivambn@yahoo.fr